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Poésie d’aujourd’hui

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Alban Kacher

dimanche 8 mai 2022, par Cécile Guivarch

l’homme qui était en fait un épouvantail (extraits)

αργο-

[aryo-] et αργό- [aryό] élém. « lent, oisif ». αργός, - ή, -ό adj. (βήμα, ρυθμός, κινήσεις) lent. / désoeuvré, oisif, inoccupé. / ( λίθος) brut. αργά adv. (μιλώ) lentement. / tard. αργότερα adv. plus tard. αργία n. f. oisiveté θ. / jour férié αρ. // (sport, etc.) suspension θ. αργοκίνητος, -η, -ο adj. lent. αργόμισθος, -η, -ο adj. planqué αργοπορία n. f. retard αρ. αργοπορώ (-έω) v. intr. (27). être en retard, retarder. αργοπορημένος, -η, -ο adj. et n. en retard, retardataire. αργοσβήυω [αργόσβησα] v. intr. mourir à petit feu. / vaciller. αργόσχολος, -η, -ο adj. et n. désoeuvré, oisif, fainéant αργώ (-έω) v. intr. (27). tarder, être en retard. / (théâtre) faire relâche

alors le pilote

plongera

dans mon œil

ne pourra pas

détourner

son œil de mon œil

 

alors le pilote arrivera

à détourner

son œil

de

mon œil

ou plutôt c’est l’appareil

qui poursuivant sa course

 

et personne n’a rien vu le copilote

fait des blagues

au

pilote qui

regarde droit

devant lui ne voit rien regarde

en fait derrière lui en fait dedans

sa tête l’homme qu’il a vu qui est moi

qui ne bouge pas

au point de ralentir tout

ce qui m’entoure

 

metríste mékhri to tría

 

la guerre est loin

d’ici où tous les déserteurs se retrouvent

metríste mékhri to tría

la grèce est loin on ne touche

presque pas terre

on sait à peine le temps qu’il fait

 

les oiseaux sont

remplis de mousse sur les arbres

les arbres sont en carton

metríste mékhri to tría

il ne faut pas s’appuyer sur les arbres

il ne faut pas s’adosser aux murs

il faut retenir son souffle

jusqu’à voir des couleurs

 

je suis assis

l’hiver

me lève

ne vient pas

je construis des cabanes ou

des bateaux ou des tours où j’attends

et quand je sors je

rentre avec de grandes

brassées de bois

 

o khimónas tha érthi

tin epómeni evdomáda

kai tha teliósi

aftó pou akolouthí

alors il sera temps de

faire semblant de

ne pas trouver le chemin

de ma maison en sucre

sachant bien qu’aucune

malheureusement sorcière n’attend derrière la porte

ni devant la cheminée où un grand feu

sachant bien qu’il n’y a pas de cheminée

ou qu’on n’allume plus

 

alors certains

posent leurs

paumes

sur les plaques de cuisson

 

alors le bois

trempé enfume la pièce

l’église sonne quinze coups je crois

il est trop tard

trop tard vraiment pour tout


 

  

traduction des passages en grec

metríste mékhri to tría :  : comptez jusqu’à trois

o khimónas tha érthi  : l’hiver viendra

tin epómeni evdomáda : la semaine prochaine

kai tha teliósi  : et finira

aftó pou akolouthí  : celle qui suit

 

Entretien avec Clara Regy

Qu’est-ce qui vous a conduit à la poésie, ou vers elle si vous préférez ?

Mon premier recueil est né d’un long voyage en solitaire à travers la Scandinavie. L’écriture s’est imposée comme une nécessité à partir du moment où j’ai eu l’impression d’avoir « quelque chose à dire ». Certes, j’écrivais depuis très jeune, essentiellement de la poésie d’ailleurs, mais l’idée du recueil à publier ne s’est imposée qu’à partir de cette expérience initiatrice en quelque sorte, dont l’intensité et la singularité ne pouvaient pour moi être transmises que de cette manière.

Est-ce la lecture de poètes ou d’auteurs particuliers qui vous a donné l’envie d’écrire des textes aussi musicaux et intrigants que ceux que vous nous proposez ici ?

J’ai été fortement marqué par la lecture de James Sacré, et notamment son recueil America solitudes, dont j’admire la simplicité et la déconstruction syntaxique/idéologique. Plus récemment, je me suis intéressé aux poètes influencés par l’objectivisme américain, dans la lignée d’Emmanuel Hocquard. Le parti pris de décentrement et le retour à la performance ont ouvert de nouveaux horizons dans mon écriture. Je travaille également à la traduction d’une poétesse grecque contemporaine, Phoebe Giannisi, dont la lecture m’a poussé à me tourner vers des formes proches du poèmes en prose.

Vos moments d’écriture sont-ils quotidiens, ritualisés ou plutôt impromptus voire sauvages ?

J’écris de manière quotidienne, mais cela par périodes. Je peux passer plusieurs mois sans écrire une ligne, mais lorsque j’entreprends un projet d’écriture ou de traduction, j’essaie de m’astreindre à une discipline d’écriture quotidienne.

Qu’aimeriez ajouter ici ?

Ma génération a la chance de voir naître de nombreuses jeunes voix poétiques, et notamment des voix féminines. Tout événement, toute revue, toute maison d’édition devrait selon moi prendre en compte cette réalité et donner à ces personnes une réelle représentation.

Et enfin quels sont les 3 mots qui vous sembleraient définir ce que l’on nomme « poésie » ?

réel
rythme
transe

En bref, je suis né en 1998. J’ai grandi entre l’Auvergne, la Normandie et la région lyonnaise (ma ville de cœur). J’étudie actuellement les Lettres Modernes (M2) à l’ENS Ulm tout en préparant une école de journalisme (le CFJ). L’an dernier, j’ai eu la joie de remporter le prix de La Crypte, et c’est donc dans cette maison que j’ai publié mon premier recueil : volvere. Je suis tout juste de retour en France après un séjour de plus de cinq mois en Grèce. J’ai pu apprendre la langue, lire la poésie contemporaine grecque (que j’espère commencer à traduire bientôt) et amorcer l’écriture d’un recueil que je viens d’achever : l’homme qui était en fait un épouvantail.


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