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Miguel Ángel Real - Extraits de « Comme un dé rond »

mardi 6 juillet 2021, par Cécile Guivarch

Traduit de l’espagnol par l’auteur et par Florence Real
© Editions Sémaphore 2019

 

2.- El mar : ausencia / 2. La mer : absence

I

El mar puede ser ausencia
hasta un punto de dolor no concebido.

Por la calle el aire seco huele a nada.
Me pregunto dónde el verdeazul,
ese color que por indefinible
ni tiene lugar en el diccionario.
Echo de menos las algas,
su putrefacción alejando a los incautos.
Nado contra el asfalto
y el polvo de esta ciudad
con su cielo puro y pírrico,
rival basto al acecho en las noches sin sueño.

I

La mer peut être absence
jusqu’à un point de douleur non conçu.

Dans la rue l’air sec ne sent rien.
Je me demande où est le bleu-vert,
cette couleur qui, indéfinissable
n’a même pas de place dans le dictionnaire.
Je regrette les algues,
leur putréfaction éloignant les naïfs.
Je nage contre l’asphalte
et la poussière de cette ville
et son ciel pur et étriqué,
rival grossier à l’affût par les nuits sans sommeil.

II

Sobre la plaza hay una fuente nueva
ante la que mis ojos sufren
la punzada de un cambio :
cuchillada mortal por insignificante.

Me recuerda cada gota mis años en el norte
como ungüentos de mostaza.
Entonces tomo un callejón cualquiera,
el más oscuro, por el que nadie pasa,
para pensar en el océano
y frente a los muros estrechos
de las casas más tristes
trazar un horizonte que nadie pueda darme.

II

Sur la place il y a une nouvelle fontaine
devant laquelle mes yeux souffrent
de la piqûre d’un changement :
coup de couteau mortel car insignifiant.

Chaque goutte me rappelle mes années dans le nord
comme des onguents de moutarde.
Alors j’emprunte une ruelle quelconque,
la plus sombre, là où personne ne passe,
pour penser à l’océan,
et face aux murs étroits
des maisons les plus tristes
tracer un horizon que personne ne peut me donner.

III

Aprendí que no importa
sentirse eternamente de otra parte,
pero me duele el mar.

Tormentas de arena
inundan las calles.
Tempestades las plazas
que arrancan sin un soplo,
            sin aliento,
las entrañas
a los que intentan debatirse.

III

J’ai appris que peu importe
se sentir éternellement d’ailleurs,
mais la mer me fait mal.

Des tempêtes de sable
inondent les rues.
Des bourrasques sur les places
arrachent sans un souffle,
            sans entrain,
les entrailles
de ceux qui essayent de se débattre.

VI

Y en cada esquina el mar,
el mar en los jardines,
en el dolor de los pasos, en las cigüeñas,
en la hierba amarilla el mar,
en los perros sedientos.
Y en tu mirada,
en tu incongruente y bendita silueta
que se afirma sobre el pedestal
de los recuerdos que se resquebrajan
            el mar.
Toman tus ojos el relevo
y me explican,
desde el reflejo de los miradores,
sobre los dogmas,
que te encontré ante el mar
            y al mar vuelvo.

VI

Et à chaque recoin la mer,
la mer dans les jardins,
dans la douleur des pas, dans les cigognes,
dans l’herbe jaunie la mer,
dans les chiens assoiffés.
Et dans ton regard,
dans ta silhouette incongrue et bénie
qui s’affirme sur le piédestal
des souvenirs qui s’effritent,
            la mer.
Tes yeux prennent la relève
et m’expliquent,
depuis le reflet des balcons,
sur les dogmes,
que je t’ai rencontrée devant la mer
            et à la mer je reviens.

 

Miguel Ángel Real

Né en 1965, il poursuit des études de français à l’Université de Valladolid (Espagne), sa ville natale. Agrégé d’espagnol, il enseigne au Lycée de Cornouaille à Quimper.
En tant qu’auteur, ses poèmes en espagnol ont été publiés dans les revues La Galla Ciencia, Fábula, El Coloquio de los Perros et Saigón (Espagne), Letralia (Venezuela), Santa Rabia (Pérou) Marabunta, El Humo et La Piraña (Mexique), ainsi que dans l’anthologie de poésie brève Gotas y hachazos (Ed. PÁRAMO Espagne, décembre 2017).

Les revues françaises Le Capital des Mots, Festival Permanent des mots Lichen Revue méninge, La terrasse, Recours au poème et Météor ont également publié certains de ses poèmes en français, originaux ou traduits de l’espagnol. Les éditions La Chouette imprévue ont choisi l’un de ses poèmes pour figurer dans l’anthologie Ralentir (novembre 2020). Deux de ses textes ont également été publiés dans l’ouvrage collectif Des jasmins en bord de mer – Poésie méditerranéenne (Association poétique Luna Rossa, Anthologie 2021)
Il a publié en avril 2019 un recueil personnel en espagnol : Zoologías, aux éditions En Huida (Séville), dont certains textes traduits au français sont parus dans Le Capital des Mots

Son recueil en espagnol Como dados redondos est en préparation aux éditions Cisnegro, Mexique. Des extraits de ce livre ont été publiés en version bilingüe aux éditions Sémaphore de Quimperlé, sous le titre Comme un dé rond (Novembre 2019).

Il se consacre aussi à la traduction de poèmes, seul ou en collaboration avec Florence Real ou Marceau Vasseur. Ses traductions ont été publiées par de nombreuses revues en France (Passage d’encres, Le Capital des mots, Mange-Monde, Recours au poème) Espagne (La Galla Ciencia, Crátera, El Coloquio de los Perrros) et Amérique (Low-Fi Ardentia-Porto Rico, La Piraña-Mexique). Dans cette dernière publication il dirige deux sections de traduction nommées « Le Piranha Transocéanique » et « Ventana Francesa ».
Il fait partie de l’équipe de rédaction de la revue poétique espagnole Crátera.

Traductions publiées :

  • Fauves (Editorial Corps Puce, France), poèmes de l’auteur équatorien RAMIRO OVIEDO (Traduit avec Marceau Vasseur, décembre 2017)
  • Erratiques, poèmes d’ANGÈLE CASANOVA, photos de PHILIPPE MARTIN. Edition bilingue. Editions Pourquoi Viens-Tu Si Tard, France, octobre 2018
  • Les travaux de la nuit, de PAUL SANDA. Edition bilingue. Ed. Alcyone, France décembre 2018
  • Anthologie d’aphoristes espagnols contemporains. Editión bilinge. Apeadero de aforistas, 2020 (Avec Florence Real)

Instagram : @realmiguelang
Blog : http://temporaleterno.blogspot.com/
Plateforme poétique : http://oupoli.fr/


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