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Poésie d’aujourd’hui

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Elise Turcotte

mardi 16 avril 2013, par Jean-Marc Undriener

[blanc]traduite en anglais par Andrea Moorhead[/blanc]


Shells form a ground
where I stretch out
feelings drift
between the branches
objects glimmer
under a streetlight
no one visits
my gloomy hotel
there is no longer noise
nor silence
Des coquillages forment un sol
sur lequel je m’étends
les sentiments voguent
entre les branches
des objets miroitent
sous un lampadaire
personne ne visite
mon hôtel obscur
il n’y a plus de bruit
ni de silence

I remember
wild poems
only a few
like knotted plants
that spring up
under the veranda
I recite them
without moving my lips
under water
my skin changed
I don’t believe in kisses
Je me souviens
de poèmes sauvages
peu nombreux
telles des plantes nouées
qui naissent
sous la véranda
je les récite
sans bouger les lèvres
sous l’eau
ma peau a changé
je ne crois pas aux baisers

That’s it
just an instant
of snow
entirely
blurred
entirely ephemeral
in which
no power
no memory
mix
Voilà
juste un instant
de neige
tout à fait
floue
tout à fait éphémère
dans laquelle
ne se mêle
aucun pouvoir
aucun souvenir

Entire days
spent digging
through the drifting
ashes

I wrest a poem
from the back
of inhumanity

Violence too
possesses
a disguise
it’s the spirit
of novelty
Des jours entiers
à fouiller
dans les cendres
volantes

J’arrache un poème
sur le dos
de l’inhumanité

La violence
possède aussi
un déguisement
c’est l’esprit
de nouveauté

The vision is stuck
in my body
like a blade
these simple fatal words
are written
to learn what makes this day
a day
in the distance I hear
the pack of lively dogs
I can see you
standing
in your furniture-filled prison
put your book on the table
you claim it’s hell
you cultivate an abstract garden
believing you’ve accomplished a miracle
open the door
I’ll help you die
La vision est plantée
dans mon corps
comme une lame
ces mots simples et mortels
sont écrits
pour apprendre ce qui fait de ce jour
un jour
j’entends de loin
la meute de chiens vivants
je peut te voir
debout
dans ta prison remplie de meubles
pose ton livre sur la table
tu prétends à l’enfer
tu cultives un jardin abstrait
en croyant accomplir un miracle
ouvre la porte
je vais t’aider à mourir

I’m swimming towards a church
in ruins
the trees are standing
their supple branches
stir
like arms that hope
without roots
without clothes
sadness builds its nest
in the landscape
Je nage vers une église
en ruines
les arbres se tiennent debout
leurs branches molles
s’agitent
comme des arbres qui espèrent
sans racines
sans vêtements
la tristesse construit son nid
dans le paysage

The stars aren’t part
of this world anymore
there isn’t any thought
of a star
if I stretch my arms
towards the surface
it’s to learn
nothing has changed
you pace up and down
carving up my death
with clinically precise
strokes of your knife
Les étoiles ne font plus partie
de ce monde
il n’y a pas de pensée
d’une étoiles
si je tends les bras
vers la surface
c’est pour apprendre
que rien n’a changé
tu fais les cent pas
en découpant ma mort
à coups de couteau
trop précis

There are dead without memory
their fall is abrupt
like that of bodies
that knock
against cliffs
the image is true
the sound lost forever
I’m thinking of you
feet resting
in the water of a river
never deep
the weary children
write another letter
storm incense
betrayal
to the only reborn angel
they know
Il y a des morts sans souvenir
leur chute est abrupte
comme celle de corps
qui se heurtent
contre des falaises
l’image est vraie
le son perdu pour toujours
je pense à toi
les pieds reposant
dans l’eau d’une rivière
jamais profonde
les enfants fatigués
écrivent une autre lettre
encens d’orage
trahison
au seul ange ressuscité
qu’ils connaissent

Complacency spared us

The house appears
like a version of laughter
waiting for paradise

The animals were lowing
the fields invaded
by meteors
I wasn’t saying the right words
in my sleep

Then the drama vanished
on the wings
of the crippled angel
La facilité nous a épargnés

La maison se présente
comme une version du rire
qui attend la paradis

Les animaux gémissaient
les champs étaient envahis
par des météores
je ne prononçais pas les bons mots
pendant le sommeil

Puis le drame est disparu
sur les ailes
de l’ange accidenté

In the underwater city
blue is a spy
it watches me suffer
for I’ve lost the use of my voice
I am deporting your face to the North
history consists of a rift
whose length
varies with time
the erosion of mountains
Dans la ville sous-marine
le bleu est espion
il me semble souffrir
car j’ai perdu l’usage de ma voix
je déporte ton visage au Nord
l’histoire comporte une faille
d’une longueur variable
selon le temps
l’érosion des montagnes

I thought I had drowsed off
a miracle happened
I was running
following wolf trails
time was as complex
as luminous
but it’s false
I’m not sleeping
fatigue
doesn’t affect me anymore
J’ai cru dormir un instant
un miracle se produisait
je courais
en suivant des pistes de loups
le temps était aussi complexe
que lumineux
mais c’est faux
je ne dors pas
la fatigue
ne m’atteint plus

Extraits de Dark Menagerie de Élise Turcotte (Sombre ménagerie, Éditions du Noroît, Montréal, 2002). Traduction de Andrea Moorhead à paraître (Guernica Editions, Toronto, 2014).


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