Poèmes de la collection j’avoue que j’écris de Gustavo Gac-Artigas
Poemas de la colección confieso que escribo de Gustavo Gac-Artigas
j’avoue que j’écris j’écris pour toi
sans te connaîtrej’écris pour toi
pour me trouverj’écris sur le vent
sans adresse de retourconfieso que escribo escribo para ti
sin conocerteescribo para ti
para encontrarmeescribo sobre el viento
sin poner un remitente
raison d’être quel est le sens de mes vers ?
je demandaile vent
miséricordieux
tourna la pageraison d’être ¿cuál es el sentido de mis versos ?
preguntéel viento
misericordioso
dio vuelta la página
les pido perdón sin su permiso
les robé parte de sus vidassin su permiso
me permití revivir un instante de sus amoressin su permiso
me apoderé de sus sentimientossin su permiso
intenté descifrar sus secretossin su permiso
fui testigo del nacimiento y muerte de un amorsin su permiso
me permití registrar su llantosin su permiso
los introduje a mi casa y a mis sueñossin su permiso
leí sus cartas antes de que las escribieransin su permiso
los espié para penetrar su pensamientoles pido perdón
sin su permiso
hoy me dirijo a ustedesje vous demande pardon sans votre permission
je vous ai volé une partie de votre viesans votre permission
je me suis permis de revivre un instant de vos amourssans votre permission
je me suis approprié de vos sentimentssans votre permission
j’ai essayé de déchiffrer vos secretssans votre permission
j’ai été témoin de la naissance et de la mort d’un amoursans votre permission
je me suis permis d’enregistrer vos pleurs
je les ai introduits chez moi et dans mes rêvessans votre permission
j’ai lu vos lettres avant qu’elles ne soient écritessans votre permission
je vous ai espionnés pour pénétrer vos penséesje vous demande pardon
sans votre permission
aujourd’hui je m’adresse à vous
autobiografía nunca existí
autobiographie je n’ai jamais existé
llegará el día llegará el día
en que los muertos
por las dictaduras se levantarán
del fondo del mar
del polvo de los desiertos
de los socavones de las minas abandonadas
y regresarán a la vida
en el recuerdollegará el día
en que los torturados
por las dictaduras elevarán sus voces
y los gritos tantos años contenidos
traspasarán los muros del silenciollegará el día
en que los hambrientos del mundo
se cansarán de aceptar migajas
darán vuelta la mesa
y exigirán un panllegará el día
en que los muertos
los torturados
los hambrientos
los despojados de historia
reclamarán sus derechos
derribando los muros del silenciollegará el día
en que el dolor
emergerá en la historia¡oh, llegará el día !
le jour viendra le jour viendra
où ceux assassinés sous les dictatures
se soulèveront
du fond de la mer
de la poussière des déserts
des mines abandonnées
et reviendront à la vie
dans la mémoirele jour viendra
où ceux torturés sous les dictatures
élèveront leurs voix
et les cris tant d’années réprimés
transperceront les murs du silencele jour viendra
où les affamés du monde
se lasseront d’accepter des miettes
feront basculer la table
et exigeront du painle jour viendra
où les morts
les torturés
les affamés
les dépouillés d’histoire
réclameront leurs droits
et abattront les murs du silencele jour viendra
où la douleur
émergera de l’histoireoh, le jour viendra !
réflexe conditionné un jour
dans la salle d’attente
d’un aéroport
on m’a ditla dictature chilienne
s’est « excédée »mon corps
« excédé »
s’est tordu de douleurreflejo condicionado un día
en la sala de espera
de un aeropuerto
me dijeronla dictadura chilena
se excediómi cuerpo
excedido
se retorció de dolor
la libertad cuando se vive
en el temor
cuando se vive
sin libertadcuando no eres dueño
de tu voluntadcuando otro se cree el dueño
de tu cuerpo
de tu mente
de tu voz
de tu destino
cuando tu mundo
se reduce a cuatro muros
sin una ventana que te permita
asomarte al mundo
cuando se fue esclavo
cuando se fue preso político
cuando se fue víctima de la violencia y el terror
cuando se es pobre en medio de la riqueza
cuando los derechos son una quimera
cuando quieren ignorar tu existencia
un solo deseo recorre tu cuerpo
el deseo de sublevarte
la libertad
amigo mío
la libertad
amiga mía
muere
en el silencio
la libertad muere
cuando no se es capaz
de rechazar la sumisión
muere al agachar la cabeza
como los cisnes de cuello negro
en las frías aguas del sur de chile
o cuando encalla en la isla de bedloe
frente a manhattanla liberté quand on vit
dans la peur
quand on vit
sans libertéquand on n’est pas le maître
de sa volontéquand quelqu’un d’autre se croit le propriétaire
de votre corps
de votre esprit
de votre voix
de votre destin
quand votre monde
se réduit à quatre murs
sans une fenêtre vous permettant
de regarder le monde
quand on a été esclave
quand on a été prisonnier politique
quand on a été victime de violence et de terreur
quand on est pauvre au milieu de la richesse
quand les droits ne sont qu’une chimère
quand on veut ignorer votre existence
un seul désir traverse votre corps
le désir de se révolter
la liberté
ami
la liberté
amie
meurt
dans le silence
elle meurt
quand on n’est pas capable
de rejeter la soumission
elle meurt quand on baisse la tête
comme les cygnes à col noir
dans les eaux glacées du sud du chili
ou quand elle échoue sur l’île de bedloe
en regardant manhattan
la muerte de dios murió en una celda a consecuencias de la tortura
murió en el grito de una mujer violada en las calles de colombia
murió de hambre en venezuela
murió de desesperanza en los campamentos de los sin casa en san francisco
murió esperando una vacuna a orillas del ganges en la india
murió ahogado intentando escapar del infierno
murió en los brazos de millones
agonizó en los brazos
de un hombre
de una mujer
de un niño
murió esperando a dios
la mort de dieu il est mort dans une cellule des suites de la torture
il est mort dans le cri d’une femme violée dans les rues de la colombie
il est mort de faim au vénézuela
il est mort de désespoir dans les camps des sans-abri de san francisco
il est mort en attendant un vaccin sur les rives du gange en inde
il est mort noyé en essayant de fuir l’enfer
il est mort dans les bras de millions
agonisé dans les bras
d’un homme
d’une femme
d’un enfant
il est mort en attendant dieu
nací viejo en vez de jugar me gustaba observar el mundo
aprendí a caminar para escapar a mi destino
las caricias despertaron mi cuerpo
los golpes blindaron mis sentimientos
en vez de poseer intenté amar
mi espalda se curvó para escribir
mi espalda se curvó para leer
mi espalda se curvó bajo el peso del dolor ajenonací viejo
intenté cambiar el llanto por la risa
al caer pensaba dos veces antes de levantarme
sabía que volvería a caer
pisaba terrenos peligrososquisieron enseñarme la seguridad
y preferí el peligro
quisieron uniformarme
y preferí la diferenciaquisieron enseñarme que la vida es dulce
dulce como la miel
dulce como la voz de la persona amada
dulce como el viento silbando en mis oídos
dulce como el agua corriendo vertiente abajo
que la dulzura era nuestro destinoy sin embargo preferí la sal
la sal que curtía el rostro
la sal que poblaba el rostro de mi amada
la sal que ardía en mis heridas
la sal del sudor que caía de mi cuerpo
la sal que recorría el desierto
mezclándose con el polvo de los muertosnací viejo
preferí ver la realidad
a que me contaran cuentos de hadashoy
viejo
espero la muerte
intentando ser el niño que no fuije suis né vieux au lieu de jouer, j’aimais regarder le monde
j’ai appris à marcher pour échapper à mon destin
les caresses ont réveillé mon corps
les coups ont protégé mes sentiments
au lieu de posséder j’ai essayé d’aimer
mon dos s’est courbé pour écrire
mon dos s’est courbé pour lire
mon dos s’est courbé sous le poids de la douleur des autresje suis né vieux
j’ai essayé de changer les pleurs en rire
quand je tombais, je réfléchissais deux fois avant de me relever
je savais que je tomberais à nouveau
je marchais sur un terrain dangereuxon a voulu m’apprendre la sécurité
et j’ai préféré le danger
on a voulu m’uniformiser
et j’ai préféré la différenceon a voulu m’apprendre que la vie est douce
douce comme le miel est doux
douce comme la voix de l’être aimé
douce comme la voie du vent sifflant dans mes oreilles
douce comme l’eau qui coule dans le ruisseau
que la douceur était notre destinet pourtant j’ai préféré le sel
le sel qui tannait le visage
le sel qui saupoudrait le visage de ma bien-aimée
le sel qui brûlait dans mes blessures
le sel de la sueur qui glissait de mon corps
le sel répandu dans le désert
se mêlant à la poussière des mortsje suis né vieux
j’ai préféré regarder la réalité en face
à ce qu’on me raconte des contes de féesaujourd’hui
vieux
j’attends la mort
en essayant d’être l’enfant que je ne jamais fus
Gustavo Gac-Artigas est un poète, romancier et metteur en scène né à Santiago du Chili.
Sa poésie a été publiée dans des revues littéraires telles que : Revista de la Academia Norteamericana de la Lengua Española (RANLE), Multicultural Echoes Literary Magazine, de l’Université de l’état de la Californie à Chico, Enclave, Revista de Creación Literaria en Español de l’Université de la cité de New York (CUNY), Nueva York Poetry Review, Latino Book Review, Letralia, etc.
Derniers recueils poétiques : deseos/longings/j’aimerais tant (collection trilingue) 2020, Ediciones Nuevo Espacio ; hombre de américa/man of the americas, 2022, Nueva York Poetry Press ; confieso que escribo, inédit.
Son poème en prose « Dr. Zamenhofstraat » a remporté le prix Poetry Park Award (1989) à Rotterdam, Pays-Bas. La traduction anglaise de son roman Y todos éramos actores, un siglo de luz y sombra (2016) par Andrea G. Labinger a remporté la deuxième place dans l’International Latino Book Award 2018 dans la catégorie « meilleur livre de fiction en traduction de l’espagnol à l’anglais ».
En tant que romancier, il a publié : Tiempo de soñar (1992, 2016) ¡E il orbo era rondo ! (1993, 2016) et El solar de Ado (2003, 2016). En tant que dramaturge, il est l’auteur de : El país de las lágrimas de sangre o nosotros te llamamos Chile libertad (1978), El huevo de Colón o Coca-Cola les ofrece un viaje de ensueños por América Latina (1982), Gonzalito o ayer supe que puedo volver (1989) et Cinco suspiros de eternidad (1992).
Après le coup d’État de 1973, Gustavo a vécu comme réfugié politique en France (1973-1985) où il a recréé sa troupe, le Théâtre de la Résistance-Chili, avec lequel il a participé dans 17 festivals internationaux de théâtre, dont Avignon et Nancy. En 1985, après une tentative infructueuse de retourner dans son pays, il a reçu l’asile politique aux Pays-Bas. Il réside aux États-Unis depuis 1992.
Pendant son séjour en France, il a été membre de la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques ; aux États-Unis, il est membre correspondant de l’Academia Norteamericana de la Lengua Española (ANLE). Il écrit régulièrement des articles d’opinion pour Le Monde diplomatique, édition chilienne, Impacto Latino, NY, et El desconcierto, Chili.
Priscilla Gac-Artigas, Fulbright Scholar, est professeure d’espagnol et littérature latino-américaine à l’Université de Monmouth, NJ, et académicienne titulaire de l’Academia Norteamericana de la Lengua Española (ANLE).
Elle a fait des études à : l’Université de Porto Rico, Río Piedras ; Middlebury College, VT, États-Unis ; la Sorbonne Nouvelle, l’Institut de Sciences Politiques, et le Centre National de la Recherche Scientifique, Paris, et a obtenu un Doctorat d’État du département d’Études Ibériques et Ibéro-américaines de l’Université de Franche-Comté, Besançon.
En tant que chercheuse, elle a publié de nombreux articles sur la littérature latino-américaine et sur la pédagogie de la langue ainsi que plusieurs manuels universitaires pour l’enseignement de l’espagnol et du français, et de la littérature et la culture latino-américaines. Son dernier livre de recherche, Colectficción : sobrepasando los límites de la autoficción (Collectfiction : surpassant les limites de l’autofiction ) est paru chez Iberoamericana/Vervuert en juillet 2022.
Elle traduit régulièrement des poèmes et des articles d’opinion pour des magazines littéraires et des journaux au format digital.
Livres traduits de l’espagnol au français : deseos/longings/j’aimerais tant (collection trilingue), 2020, Ediciones Nuevo Espacio ; de l’espagnol à l’anglais (avec Andrea G. Labinger) : hombre de américa/man of the americas, 2022, Nueva York Poetry Press.