Derrière ce titre très « seventies », Marlène Tissot nous conte un univers, qui est le sien, mais qui semble aussi, être le nôtre : celui d’un être nourri de l’enfance, questionnant encore et toujours la vie, parfois drôle et souvent désenchantée.
Elle pose tout d’abord un regard, un désir sur « La fille aux chaussures roses », je pourrais me noyer / dans l’océan lacté / des jambes de la fille... , moque ceux qui derrière les « ça » « Des mines outragées » crient aux loups devant la femme qui se fait : « ça serait ma fille / elle se promènerait pas dans cette tenue ! » « Faut pas que ça s’étonne de se faire agresser / si ça montre son cul » !
Puis de chair et de sang, elle converse avec sa mère ou plutôt monologue « Il faudra un jour que tu m’apprennes à nager dans la vie aussi gracieusement que toi » puis le bistrot, le vin, son père.
« On dirait que j’ai sept ans pour l’éternité », elle s’arrête à l’âge de raison quand elle est persuadée d’avoir ... tort. Puise et creuse encore dans l’enfance, être grand serait alors : « égoutter les nouilles/ ou sortir le linge de la machine à laver » ?
Ailleurs, lorsque l’on poursuit ce voyage, puisque lire ce texte en est un, on revient aux choses du monde, Marlène Tissot quitte à nouveau son « elle » pour dénoncer l’indifférence : « Elle parle des mal-logés avec une mine contrite » dans « Question d’éthique ».
Si l’on sourit à ce grand projet : « séduire le marchand de sable et / le glisser dans mon lit », « Script » nous émeut vraiment : « peut être que je suis / restée coincée / dans la coupure pub »...
Dans une écriture sincère, tour à tour sensuelle, drôle et parfois inquiète, Marlène Tissot joue à cache-cache avec le chagrin et le désir « et puis elle disparaît au coin de la rue » … ou du moins le croit-elle... Rien n’est moins sûr après la lecture de ce texte élégamment illustré par des encres de Somotho, on a envie de tout sauf de l’oublier.
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Sous les fleurs de la tapisserie, Marlène TISSOT, images de SOMOTHO,
Éditions Le Citron Gare, novembre 2013
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Clara Regy