Née en Bretagne en 1957, Marie-Josée Christien vit à Quimper dans le Finistère. Poète, auteur jeunesse, critique littéraire, collagiste, elle est responsable de la revue annuelle Spered Gouez / l’esprit sauvage qu’elle a fondée en 1991.
Elle collabore régulièrement au magazine bimensuel ArMen et occasionnellement au magazine numérique Unidivers. Ses chroniques critiques sont publiées dans les revues Spered Gouez / l’esprit sauvage (Nuits d’encre ; Revues d’ici, revues d’ailleurs) et dans Interventions à Haute Voix (Vents d’Ouest). Ses notes de lecture ont été accueillies dans les Cahiers du Sens de 2010 à 2020.
Présente dans une cinquantaine d’anthologies et d’ouvrages collectifs, traduite en allemand, bulgare, espagnol, portugais et breton, elle a publié une trentaine d’ouvrages.
Deux ouvrages lui sont consacrés : La poésie pour viatique (Cahiers Chiendents n°118, Editions du Petit Véhicule, 2017) et Marie-Josée Christien passagère du réel et du temps (éditions Spered Gouez, collection Parcours, 2020).
Pour l’ensemble de son œuvre, elle est lauréate du prix Xavier-Grall et a reçu le Grand prix international de poésie francophone.
Elle est membre de la SGDL, de la Charte des auteurs jeunesse et de l’Association des Ecrivains de Bretagne.Site personnel : https://mariejoseechristien.monsite-orange.fr
Extraits de : Les extraits du temps
Tout est noyé dans l’air
un pan de mur blanc s’élargit
les soucis sont écartés l’espoir aussi
Au jour les lumières pâlissent
et sur le trottoir glissent
tous les désirs éparpillés
qui restent morts dans les coulisses
de l’ombre où ils sont nésLes mains cherchent
dans le vide
l’horizon qui n’existe pas
Quelqu’un parle et je suis débout
écartelée entre l’avidité de connaître
et le désespoir d’avoir connu.*
En hommage à la chanson New year’s day du groupe U2
Dans la mémoire
de grandes étendues de neige
brillent
entre chaque massacreToute la douleur de la terre
se contracte et se voûte
surgit en une haine imprévisible
crêtée de foudre
et ruisselante de vigueur.
Extraits de : Le carnet des métamorphoses
A mon fils Antoine,
L’inconnu
qu’il me faudra déchiffrer
arrondit en moi
le silence
de sa sphèreCette aube à l’affût
accueille une autre lumière
où conduit
toute naissance.*
La chose naissante
s’arrondit
au sein des profondeurs
les plus spongieuses
distendues
dans la fiévreuse attente.
Extraits de : Temps morts
Adossés au secret
nous cheminons sur d’étroits sentiers
inconsistants
nous avons l’illusion
de façonner le monde.*
L’ébauche du jour
dénoue
le lacis des ventsles pores de la terre
exsudent la lumière
circulant dans la courbe de l’exilla voix
qui me fait écho
n’est plus la mienneelle ne craint plus les lenteurs
inexorables.*
Au fond des mots
épris de nuit
mon silence
a longtemps erré
dans l’écho
de sa langue à naîtrej’adopte
la marche anonyme
réponse de ce qui
en moi
respire la terre.
Extraits de : Lascaux & autres sanctuaires
Grottes des Combarelles (Dordogne)
Dans la lumière mêlée
des gravures et des signes
ferment le langagele silence investi
de sens soustrait aux mots
nous met à distance
et nous lie fortement.Grotte de Font-de-Gaume (Dordogne)
Entre les roches étroites
tout le relief
frisonne de couleurs
aux énergies adversesalliances scellées
par les magiciens de l’ombre éblouissante.
Extraits de : Conversation de l’arbre et du vent
Tout peut cacher le soleil
un nuage
la pluie
l’ oubli.*
L’aube chuchote
les oiseaux jacassentLe repos du merle
brille
avivé par la neigeL’arbre est si seul
il n’y a que le vent
qui lui prête attention.*
Passager immobile
l’arbre n’a que le vent
pour envisager
ses destinées lointaines.
Extraits de : Un monde de pierres
Grand menhir brisé (Locmariaquer)
Il n’y aurait presque plus de reflets
de cette lumière seulement
le souvenir d’un reflet
infiniment opaque épars
brisé.Alignements de Kermario (Carnac)
Dans les ricochets de la lumière
la pierre
inonde le regard.Alignements de Lagad-Yar ( Camaret)
Une ligne de pierres
vacillantes
traverse les nuagesL’horizon
s’en éclaire.
Extraits de : Quand la nuit voit le jour
Sans la nuit
que serait le miracle
de l’aube
l’apparition du jour
derrière les paupières ?*
Questionne sans fin
la nuit et le jour
le calme et la tempête
l’envers et l’endroittu trouveras le répit
d’un silence de feu.
Extraits de : Affolement du sang
A contresens du flux
les mots épongent
le sangla cendre
comme seule preuve
de viel’instant de la mort
rend caducs
tous les autres.*
La vie incertaine
noue nos illusions
à nos ombresTout ce qui fut
n’est que sable
qui fuit
du creux de nos mains.*
On n’écrit pas la tristesse
mais ce qui disparaît
subitementquand l’amitié se confronte
à son absence.
Extrait de : Eclats d’obscur et de lumière
J’aime prendre mon temps, et aussi le perdre.
Il y a une distinction fondamentale entre faire et agir. Agir implique une nécessité intérieure.
Face au diktat du dynamisme obligatoire, à l’injonction de l’hyperactivité, ne rien faire devient presque un acte de rébellion, ou une question de survie.
Agir me permet de ne pas subir le poids d’une situation, me donne une bouffée d’oxygène.
Accepter l’effort et sa contrainte, dès lors que l’on sait ce qu’ils peuvent nous apporter.
« Le poète est un enfant qui se souvient », Baudelaire. Tout ce que je suis s’est constitué pendant mon enfance et ma jeunesse.
Je creuse mes idées comme les archéologues creusent le sol.
Je suis une instinctive qui prend le temps de réfléchir avant de revenir à l’intuition première.
L’artiste authentique choque sans intention de choquer, parce que sa vision du monde dérange malgré lui. Ceux qui ont pour posture de choquer à tout prix font fausse route.
Extraits de Alambic (inédit, en cours d’écriture)
Sans l’ombre
rien ne peut
être ditau fond des mots
se dépose
ce que je ne peux prononcerl’invention du possible
naît de l’inachevé.*
Le poème naît
après avoir été vécu
intensémentA l’inverse
il arrive parfois
que le poème
nous précèdeSeule l’essence
du destin
est réelle.
Extraits de : Alchimie des sens (inédit, en cours d’écriture)
L’élan de la foudre
sur les lèvrescomme une connivence à prolonger
dans la jubilation
mouillée
de nos corps éblouis.*
Mon rire contre son épaule
accueillante
comme le pouls du mondej’attends
qu’il souffle sur ma braise
avec douceur
son sourire
face au mien.
Extraits de : Généalogie de la matière (inédit, en cours d’écriture)
La transe du temps
déchire
la matière ardente
ravinée
d’éclairsles poussières de feu
s’effacent
dans d’aveugles collisionsnuées titubantes
jusqu’à la faille
où le noir éblouit.*
Le tremblement de la lumière
se mesure
en millième de seconde
la nuit éternelle
en millions d’annéesaux limites
de l’inépuisable cosmosles chemins perdent
leurs repères.*
La lumière secrète
de la matière
attend la remontée
des traces plus anciennes
de la part inconnue
du mondela clarté du vivant
à naître
de la matière inerte.
Bibliographie
(sélection d’ouvrages disponibles)
Les Editions Sauvages
- A l’horizon des terres infinies (Variations sur Paul Quéré), coll. La Pensée Sauvage, 2019
- Constante de l’arbre, avec le photographe Yann Champeau, coll. Carré de création, 2020
- Correspondances, recueil à deux voix avec Guy Allix (frontispice de Gwezenneg), coll. Dialogue, 2011
- Eclats d’obscur et de lumière (collages de Ghislaine Lejard), coll. La Pensée Sauvage, 2021
- Entre-temps, précédé de Temps composés, nouvelle édition (illustrations de Marc Bernol), coll. Phénix, 2016.
- L’attente du chat (illustrations de Laëtitia-May Le Guélaff), coll. Askell, 2012
- Le carnet des métamorphoses (préface et illustrations de Jacky Essirard), coll. Askell, 2007
- Les extraits du temps (préface de Guy Allix, collage de l’auteure), coll. Askell, 2009, Prix des Bretons de Paris 2009
- Poème absent, dessins de Sophie Degano (tirage signé et limité à 100 exemplaires sur papier velin), coédité avec ExVoto Editions, 2018
- Petites notes d’amertume (préface de Claire Fourier, land art de Roger Dautais), 2014
- Sentinelle, nouvelle édition augmentée (collages de l’auteure), coll. Phénix, 2021
- Temps morts (préface de Pierre Maubé, encres de Denis Heudré), coll. Askell, 2014
- Un monde de pierres, suivi de Steudadoù Karnag (traduction Jil Penneg), nouvelle édition augmentée, coll. Phénix, 2015. Prix poésie de l’AEB 2002 pour la première édition (Blanc Silex, 2001)
Autres éditeurs
- Affolement du sang (préface de Jean-François Mathé, encres de André Guénoun), Al Manar, 2019
- Aspect du canal, Sac à mots éditions, 2010, sélection du Printemps des Poètes 2011
- Constellations (tirage limité en typographie), Atelier de Groutel, 2010
- Conversation de l’arbre et du vent (Tertium éditions, 2008, Tapabord, 2018), liste de référence de l’Education Nationale
- Fenêtre sur nuit (tirage limité, peintures de Babeth Leroy), éditions de la Lune Bleue, 2014
- Lascaux & autres sanctuaires (Jacques André Editeur 2007)
- Quand la nuit voit le jour (photographies de Yann Champeau), Tertium éditions, 2015
Livres et tirages d’artistes avec Serge Marzin (atelier An Awen), Francis Rollet (Atelier de la Petite Mer), LaOdina (coll. Daniel Leuwers), Ghislaine Lejard (coll. Livre pauvre) et Sophie Degano.
Tirages de tête d’Affolement du sang (Al Manar) avec trois encres originales de André Guenoun.Publication dans les anthologies et ouvrages collectifs (sélection chronologique)
- Mille poètes, mille textes brefs (dir. Michel-François Lavaur), L’Arbre à Paroles, Belgique, 1997
- Usage de Salah Stétié (dir. Bruno Geneste et Yann Le Bihan), Editions Blanc Silex, 2001
- Poesia francesa de la region de Bretana, anthologie bilingue de poètes de langue française de la région Bretagne, sélection de Chantal Bideau, traduction en espagnol par Silvio Mattoni, éditions Vox, Argentine, 2009
- Visages de poésie, portraits au crayon & poèmes dédicacés de Jacques Basse, Tome 2, Rafael de Surtis, 2009
- Poésie de Bretagne, anthologie de Max Pons, La Barbacane, 2002
- L’année poétique 2008 (dir. Patrice Delbourg, Jean-Luc Maxence, Florence Trocmé), Seghers
- Zeit zum Leben / Le temps de vivre : 21 poètes de Bretagne, anthologie bilingue, traduite en allemand par Rüdiger Fischer, Editions En Forêt, 2010
- L’Athanor des Poètes, anthologie 1991-2011 de Jean-Luc Maxence et Danny-Marc, Le Nouvel Athanor, 2011
- Traversée d’Océans, Voix poétiques de Bretagne et Bahia, anthologie bilingue, éditions Lanore, 2012
- Appel aux riverains, anthologie de Christophe Dauphin, Les Hommes sans Epaules, 2013
- Xavier Grall parmi les siens (dir. Jacques Basse), Rafael de Surtis Editeur, 2013
- Liberté de créer, liberté de crier (dir. Françoise Coulmin / Pen Club), Editions Henry, 2014
- Auteurs des péninsules, 30 portraits en Bretagne par Alain-Gabriel Monot et Catherine Le Goff, Locus Solus, 2015
- Eloge et défense de la langue française, anthologie de Pablo Poblète et Claudine Bertrand, éditions Unicité, 2016
- Quimper des écrivains (dir. Alain-Gabriel Monot), éditions Alexandrines, 2016
- La littérature bretonne de langue française (dir. Pascal Rannou), Yoran embanner, 2020
- Poètes en Bretagne (Lectures choisies) de Pierre Tanguy, Les Editions Sauvages, 2021.
Publication dans les revues (liste non exhaustive)
Interventions à Haute Voix, Traces, Foldaan, Ecriterres, Le nouvel Ecriterres, Décharge, L’Encrier, Le Squelette laboureur, Rivaginaires, Lieux d’Être, Encres Vives, Les Voleurs de feu, Rimbaud Revue, Quimper est Poésie, L’Authenticiste, Place au(x) Sens, Comme en poésie, Friches, Spered Gouez / l’esprit sauvage, Avel IX, La Barbacane, Hopala !, 7 à Dire, Traversées (Belgique), Souffles, Saraswaki, Sémaphore, Littérales, Les Cahiers du Sens, Poésie Première, Les Hommes sans Epaules, Cairns, Elaïg, Poésie sur Seine, Zinzoline, Ce qui reste, Digor, Arts & Poésie, Reflets, Possibles, Vocatif, Les Cahiers de la rue Ventura, Concerto pour marée et silence, Chiendents, Fenêtre sur poésie, Cabaret, Texture, Les Cahiers des poètes de l’Ecole de Rochefort...