Né le 1er février 1945 à Signy l’Abbaye dans les Ardennes, André Velter publie son premier livre (Aisha), en compagnie de Serge Sautreau. Il est l’auteur d’essais (avec Marie-José Lamothe) : Le Livre de l’outil, Les Outils du corps, Les Bazars de Kaboul, Ladakh-Himalaya, et de nombreux ouvrages de poésie, essentiellement publiés chez Gallimard.
André Velter partage son activité entre les voyages au long cours (Afghanistan, Inde, Népal, Tibet) et la mise en résonance des poésies du monde entier.
Sur France Culture, il a créé Poésie sur Parole (1987-2008). Il a également animé Agora (de 1995 à 1998), Poésie Studio (de 1997 à 1999) et les Poétiques, enregistrées chaque mois en public au Théâtre du Rond-Point, avec Claude Guerre (de 1995 à 1999). Orphée Studio, poésie d’aujourd’hui à voix haute, livre-témoignage sur l’expérience des Poétiques a été publié en Poésie/Gallimard. De 2002 à 2004, douze soirées d’Orphée Studio ont été enregistrées en public au Théâtre de l’Aquarium toujours au côté de Claude Guerre.
Les chroniques littéraires d’André Velter dans Le Monde s’attachent surtout à l’Orient.
Il a dirigé, chez Gallimard, la collection Poésie/Gallimard.
Toute son œuvre poétique est vouée au souffle, à la révolte, à l’amour sauvage, à la jubilation physique et mentale.
Résolument attaché à la « voix haute », il tente d’inventer une oralité nouvelle, créant régulièrement avec comédiens et musiciens de vastes polyphonies.
Principaux disques édités : Ça Cavale, Le Grand Passage, Jérusalem 2000, La Traversée du Tsangpo, La Faute à qui, Décale-moi l’horaire.
Il a reçu le « Goncourt / Poésie » en 1996.
Source : www.andrevelter.com
Extrait de L’arbre-Seul (Poésie/Gallimard, 2001)DE REFLET EN REFLET
(mirage)
La soif précède la source
comme le désir le désert
le désir infini d’un infini désertIl faut vivre à découvert
pour entrer dans la fraternité des chosesFils du soleil
amant des songes
gardien de la source ensablée,
ton ombre est faite de la poussière de la nuitQuand la rosée est absente
la source monte à la tête*
INDOMPTABLE
l’espace est un bandit d’honneur
c’est à lui que tu penses
quand tu suis le galop de ton cœurle destin t’a laissé la bride sur le cou
et la poussière au goût de silice et de feu
mange ta bouche sans mémoirele sauve-qui peut s’évade d’une géhenne intime
qui voudrait déchirer son ciel rouge
à la proue des nuageslà-bas l’impossible dit merveille ou désastre
comme défi d’une noire solitude
contre le sabot fendu de l’aubel’espace est un bandit d’honneur
Extrait de Les solitudes (Gallimard, 2017)
Nocturne
Il est une heure sous les étoiles
Où s’allient simplement les désirs et les ombres.
Ce qui est là n’impose rien,
Toute présence étant douce et complice,
Légère à la vie comme au toucher,
Harmonieuse en plan large ou serré.
Ainsi le réel agrandit ses royaumes
Sans répudier marges ni rêves,
On dirait qu’une libation est offerte
Aux pierres, aux choses autant qu’aux dieux,
A l’inconnu, à la nuit autant qu’au poète qui s’enivre, Au silence alentour et au rythme profond Où bat le sang du ciel Avec ce qui renaît des amours insensées.} </quote> <quote> {{Extrait de {Loin de nos bases } (Gallimard, 2016)}} {De Kashgar à Touen-houang pourtant, nous avons été si joyeux dans une vie de bord de désert et de route. Restituté au mouvement qui n’était plus premier, ni primitif, ni primaire, mais attentif à la corne et au suint, sans l’ombre d’une attente, d’une croyance, d’une sauvegarde. Assuré d’être sans assurance, refusant l’esquisse d’une prise en charge ou d’une protection, libre d’être libre, si le mot ressurgissait dépulpé, désembourbé, raclé jusqu’à l’os. Libre comme personne quand on est l’écharde de quelqu’un ! Quand on est ce quelqu’un qui se trouve pour solde de tout compte, à l’estime en étant à la rue. Et nous étions dans cet état d’esprit qui persuade de se présenter en état de brute civilisée, de baroudeur raffiné, de déclassé subtil. La marche devenait dialectique, et ça jubilait aux articulations : des clavicules aux chevilles, des coudes aux genoux, des hanches aux cervicales. Les récits, les poèmes, les disputes, les sanglots remontaient à la tête. C’était le charroi du dedans qui rattrapait l’escorte après son faux départ et cette histoire d’aiguillage mental qui avait vacillé.} </quote> <quote> {{Extrait de {Avec un peu plus de ciel} (Gallimard, 2012)}} {Qu’il le veuille ou non L’horizon m’accompagne C’est une chimère en chemin Une rumeur sourde qui secoue les lointains Une manière de lâchez-tout De providence accidentelle
A hauteur des yeux et des tempesLà-bas est un autre
Là-bas est un être de chair et de vent
Que j’identifie à merveille
Dans le sens de la marche
Un sortilège de sables mouvants
Une vue de l’esprit dans un mouvement
Qui se configure au futur intérieurAu futur infaillible
Extrait de Une autre altitude, poèmes pour Chantal Mauduit (Gallimard, 2001)
Une voile ou un drap flotte sur nos montagnes, épousant pics et précipices, glaciers et vallées, sentiers et surplombs, couvrant cette vision immense qui nous a mis en marche, gommant les repères, les parcours, les noms. C’est le relief fantôme du troisième pôle que nous avons imposé à la terre. Il n’y a plus d’Everest ou de Kangchenjunga, d’Annapurna ou de Dhaulagiri, mais une ligne de crête saccadée, trace livide de nos battements de cœur.
Au sommet, quel que soit le sommet, je retrouve les papillons d’altitude qui ont du ciel sur les ailes et veulent toujours se poser sur le dos de ta main.
Extrait de Le septième sommet, poèmes pour Chantal Mauduit (Gallimard, 2000)
Si vaste le cœur
sur ce Toit du Mondeoù l’on n’attend rien
du destin des hommeset si vaste l’âme
des ciels, des sommets…Tu as pris la pente
qui défie le tempsqui passe sans escales
toutes les latitudes.Tu as mis le sens
très au-dessus de toipour que danser
soit un envolet ta vie
une aventure d’étoile.Tu as choisi de gagner
par la verticale ascendantele troisième pôle
qui déboussole.
Extrait de L’amour extrême, poèmes pour Chantal Mauduit (Gallimard, 2000)
Quand, en un seul jour, tout se fracasse et se brise,
il faudrait savoir trouver son élan dans la défaite
autant que dans la conquête. Il faudrait pouvoir
partir à la suite d’un nuage dans un ciel déserté.Je me remémore tous les livres d’Asie,
je convoque les viatiques qui furent miens,
les aventureuses sagesses où je puisais
et les chemins non balisés vers les vallées secrètes.Qu’en est-il de cette errance que je voulais
souveraine ? Qu’en est-il du divin éveillé
en nous ici et maintenant ? Qu’en est-il
de nos exploits en ce jour de débâcle ?
Extrait de Au Cabaret de l’éphémère (Gallimard, 2005)
(divin, in memoriam)
maintenant tu es né
maintenant tu es mortà chaque instant la transe
s’efface sous les pas du danseur
qui descend du Tibet
jusqu’à Chidambaramle dieu bondissant
s’évade à ciel ouvert
ivre un peu
en son joyeux néant.maintenant tu es mort
maintenant tu es né.
Bibliographie sélective
Poésie
- Aisha, Gallimard, 1966
- Du prisme noir, Fata Morgana, 1971
- De la déception pure, manifeste froid, Sautreau, Velter, Bailly, Buin, 10/18, 1973
- Dar-I-Nûr, Nulle part, 1983
- Velickovic, l’épouvante et le vent, Fata Morgana, 1988
- L’enfer et les fleurs, illustrations de Saura, Fata Morgana, 1988
- L’Arbre-Seul, Prix Mallarmé, Gallimard, 1990 (réédition Poésie/Gallimard, 2001)
- Autoportraits, Paroles d’Aube, 1991
- Du Gange à Zanzibar, Prix Louise Labé, Gallimard, 1993
- Passage en force (1971-1974), préface de Bernard Noël, Le Castor Astral/Les Écrits des Forges, 1994
- Ouvrir le chant, Le Castor Astral/Les Écrits des Forges, 1994
- Etapes brûlées (1974-1978), Le Castor Astral/Les Écrits des Forges, 1996
- Le Haut Pays, Gallimard, 1995
- Zingaro suite équestre, dessins d’Ernest Pignon-Ernest, Gallimard, 1998 (réédition Folio/Gallimard n°3385, 2000)
- Le septième sommet, poèmes pour Chantal Mauduit, Gallimard, 1998
- La vie en dansant, Gallimard, 2000
- L’amour extrême, poèmes pour Chantal Mauduit, Gallimard, 2000 (réédition Poésie/Galllimard, 2007)
- Une autre altitude, poèmes pour Chantal Mauduit, Gallimard, 2001
- Au Cabaret de l’éphémère, Gallimard, 2005
- Zingaro suite équestre & Un piaffer de plus dans l’inconnu, dessins d’Ernest Pignon-Ernest, Gallimard, 2005
- Midi à toutes les portes, Gallimard, 2007
- Le Haut Pays suivi de La Traversée du Tsangpo, Gallimard, 2007
- Tant de soleils dans le sang, livre-DVD avec Pedro Soler & sept poèmes-tracts avec Ernest Pignon-Ernest, Alphabet de l’Espace, 2008
- Extases, avec Ernest Pignon-Ernest, Gallimard, 2008
- Paseo Grande, livre-récital avec Olivier Deck et sept poèmes-talismans avec Antonio Segui, Gallimard, 2011
- Avec un peu plus de ciel, Gallimard, 2012
- Zingaro suite équestre & autres poèmes pour Bartabas, dessins d’Ernest Pignon-Ernest, Gallimard, 2012
- Prendre feu, avec Zéno Bianu, Gallimard, 2013
- Jusqu’au bout de la route, livre-récital avec Gaspar Claus, Gallimard, 2014
- Tant de soleils dans le sang, livre-récital avec Pedro Soler & sept poèmes-tracts avec Ernest Pignon-Ernest, Gallimard, 2014
- Le Tao du Toreo, dessins d’Ernest Pignon-Ernest, Actes Sud, 2014
- Pour l’amour de l’amour, avec Ernest Pignon-Ernest, Gallimard, 2015
- Loin de nos bases, avec une Adresse de François Cheng, Gallimard, 2016
- Le jeu du monde, cartes à Yanny, Gallimard, 2016
- N’importe où, livre-récital, CD avec Jean-Luc Debattice & Philippe Leygnac, dessins d’Ernest Pignon-Ernest, Le Castor Astral, 2017
- Les solitudes, Gallimard, 2017
Page proposée par Valérie Canat de Chizy
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