« Au bout de ma douleur/ il y avait une porte.// Ecoute-moi bien : ce que tu appelles la mort,/ je m’en souviens. » (Louise Glück, L’iris sauvage, in L’iris sauvage, p.25, édition bilingue, Editions Gallimard, 2021)
La poésie s’offre parfois dans un hasard. On voit un livre neuf déposé parmi d’autres sur l’une des tables d’un libraire, on le saisit, l’ouvre au hasard et aussitôt se déploie l’évidence d’une clarté, d’une voix, d’un paysage unique et inconnu, qui nous bouleverse. On lit par exemple : « Au-dessus du monde immobile, un oiseau solitaire appelle/ à son réveil parmi les branches ébènes. » (Fin de l’hiver, p.43) On ne sait encore rien de l’auteur, sinon cette mention indiquée sur le bandeau rouge du livre : « Prix Nobel de littérature, 2020 ». Louise Glück n’est encore à ce moment qu’un nom qu’on a entendu prononcer, à propos du célèbre prix plus souvent accordé aux romanciers qu’aux poètes. Et voici soudain, dans ce premier recueil enfin traduit en français, cet oiseau de fin d’hiver, comme s’il était là depuis toujours, le même dans toute poésie qui arrête l’action des hommes et les invite à lever des yeux désintéressés sur le monde. Il appelle, en un monde intemporel, car il est lui-même poésie dans sa simplicité d’être, de constat, de question : « Vous vouliez naître : je vous ai laissés naître./ Quand ma peine a-t-elle une seule fois/ contrarié vos plaisirs ? » Mais qui s’exprime vraiment ici ? Est-ce un oiseau prophète révélant à l’initié ses origines, comme l’oiseau de la forêt dans Siegfried ?
La traductrice, Marie Olivier, nous avertit dans sa préface : « Cependant, dès les premières pages, du recueil, la question de l’identité du locuteur se révèle problématique. En effet, l’iris sauvage est saturé de la présence des premières et des deuxième personnes du singulier qui peuvent paraître difficile à identifier à première vue. Organisés selon le rythme des saisons et le cycle liturgique des Heures, les poèmes sont tous animés par des voix particulières. Les poèmes intitulés « Matines » et Vêpres, recueillent les prières des humains, ceux dont le titre indique un moment précis de l’année, de la journée, ou une condition météorologique tels « Au cœur de l’été », « Matin clair » ou « Vent faible » ont Dieu ou un « être céleste » comme persona. Finalement, la troisième catégorie de poèmes est dispersée dans le recueil selon l’ordre d’apparition des plantes et fleurs qu’ils vocalisent, désignées par leur espèce ou leur nom commun dans le titre : « Trillium », « Lamium », « Fleurs des champs », « Le coquelicot rouge », « Trèfle… » (p.12-13)
Fin de l’hiver, en tant que poème relié à un moment de l’année, donnerait donc voix à un « être céleste » - l’expression est de Louis Glück elle-même, qui l’emploie dans sa correspondance avec Marie Olivier. Et en effet, même sans connaître cette particularité, on peut deviner qu’une entité transcendante s’exprime, en lisant la suite : « Plongeant/ à la fois dans les ténèbres et la lumière,/ affamés de sensations// Comme si vous étiez une sorte de nouvelle chose, à vouloir/ vous exprimer,// tout éclat et vivacité,// ne pensant pas une seconde/ que cela vous coûterait quoi que ce soit,/ n’imaginant pas une seconde le son de ma voix/ comme une chose qui ne fasse partie de vous – ». Le Dieu potentiel de ce poème fixerait-il une impossibilité de fait, un reproche, un interdit ? Il faut encore avancer pour mieux comprendre ce que suggère le déroutant locuteur : « vous ne l’entendrez pas dans l’autre monde,/ jamais clairement,/ ni dans l’appel de l’oiseau, ni dans le cri de l’homme,// ni dans le son clair, seulement/ dans l’écho persistant/ de tout son signifiant au revoir, au revoir –/ la seule ligne continue/ qui nous lie l’un à l’autre. » (p.43-44) La voix inaperçue rejette sa fragile et incertaine saisie jusqu’à l’ultime vers du poème, nous laissant dans l’étonnement le plus complet puisque rien de décisif n’est finalement donné, tout demeurant dans un suspens d’ambivalence essentielle. Quel est tout d’abord l’autre monde évoqué ? La mort où rien de ce Dieu si étrange ne serait enfin révélé ?
Mais cela voudrait-il dire qu’il n’existe pas ou seulement qu’il continue de se dérober ? Ou bien l’autre monde n’est-il que celui-ci dans la métamorphose que lui imprime le changement de saison ? nous sommes en effet à la fin de l’hiver, aux approches du printemps. Or la notion de renaissance est, selon Marie Olivier, inséparable de l’univers de Louis Glück : « Les poèmes mettent souvent en scène un environnement qui se voudrait à la fois terre matricielle, lieu d’une renaissance et retour au néant. Les poèmes donnent à penser un au-delà de l’image à travers l’expérience dans le corps d’un milieu physique dénué d’extrémités, qui n’est pas pour autant l’esprit : l’infinitude. » La notion de renaissance laisse supposer que l’autre monde est peut-être aussi terrestre, donc d’une façon ou l’autre, lié à un cycle saisonnier, cosmique et ontologique, admettant une forme de réincarnation. Les vers suivants, par leur double allusion à l’appel de l’oiseau et au cri de l’homme, renvoient également au monde sensible où éclatent des voix qui semblent exprimer davantage stupeur ou détresse que prophétie. Jouant sur le sens également double de « clairement » et de « clair » (« clearly » et « clear » dans le texte originel), Louise Glück suggère que rien n’est élucidé. Au contraire, ce n’est que dans un « écho persistant », donc la rémanence d’une formulation qui se dissout, que se laisse deviner la voix.
On pourrait alors penser au célèbre passage de l’Ancien Testament dans lequel Dieu ne se laisse appréhender qu’indirectement à travers une brise : « Sors et tiens-toi sur la montagne devant le Seigneur car je vais passer. » Il y a alors un ouragan, si fort et si violent qu’il fend les montagnes et brise les rochers, mais le Seigneur n’est pas dans l’ouragan ; puis, il y a un tremblement de terre, mais le Seigneur n’est pas dans le tremblement de terre ; et après un feu, mais le Seigneur n’est pas dans ce feu ; et après ce feu, le murmure d’une brise légère. Aussitôt, Élie se couvre le visage avec son manteau, sort et se tient à l’entrée de la caverne. Le Seigneur lui dit : « Repars par le chemin du désert. » (Premier Livre des Rois, chapitre 19, versets 8 à 13) Cependant, si révélation il y a, elle n’est ici que déceptive puisque la voix divine éventuelle ne se donne que dans le retrait d’un « au revoir » également double, comme si un mouvement de glissement, celui de l’écho dont on espérait que même indirectement il permettrait de découvrir la résonance espérée, se riait de notre attente et se contenait de répéter à vide l’annonce de sa propre disparition. Faut-il y voir un effacement de Dieu équivalent à sa négation par l’être humain, ou une forme d’inexplicable abandon de l’homme par la divinité ?
C’est dans ce sens que semble aller dix pages plus loin, et justement en un écho, un autre poème, Vent faible - encore une allusion à la brise biblique ? On peut le supposer tant poésie de Louise Glück est subtilement imprégnée de nombreuses références : « Lorsque je vous ai créés, je vous aimais./ Désormais je vous plains.// Je vous ai donné tout ce dont vous aviez besoin :/ un lit de terre, une couverture d’air bleu -// Alors que je m’éloigne de vous peu à peu/ je vous vois plus clairement./ Vos âmes devraient être immenses désormais,/ pas ces/ petites choses parlantes - » (p.53). Parler, au lieu de faire chanter une voix, ne serait-ce pas là le défaut des hommes auxquels s’adresse ainsi un terrible reproche, qui donne d’ailleurs moins immédiatement le sentiment d’une faillite humaine que d’une exigence démesurée de la divinité. Marie Olivier précise à ce propos : « Dans L’iris sauvage, l’humain et le végétal sont représentés dans l’attente perpétuelle d’un signe de Dieu. Tyrannique, inspiré de l’Ancien Testament, le Dieu mis en scène punit plus souvent qu’il ne réconforte. Les poèmes qui ont pour voix poétiques plantes et humains présentent le plus fréquemment une tonalité élégiaque, expression des souffrances de la vie terrestre, infligées par un Dieu inaccessible, comme on peut entendre dans « Trillium » : il y a un instant seulement, je ne connaissais pas ma voix/ et s’il m’en était donné une,/ si gorgée de chagrin, mes phrases/ gémiraient en un accord de cordes. » (p.17)
C’est encore la voix, mais cette fois-ci humaine, angoissée, poignante, alors que le double « au revoir » de la voix divine semblait se jouer de ceux qui la cherchaient. Dans Trillium, mentionné par Marie Olivier, le désarroi et le dénuement se lisent dès les premiers vers, en écho d’une autre grande voix poétique, celle de Dante, puisque Louise Glück écrit : « A mon réveil, je me retrouvai dans une forêt. L’obscurité/ semblait naturelle, le ciel à travers les pins/ épais de tant de lumières.// Je n’avais conscience de rien ; je ne pouvais que regarder./ Et alors que j’observais, toutes les lumières du paradis/ se dissipèrent en une seule chose, un feu/ se propageant dans la fraîcheur des sapins./ Puis il devient impossible/ de fixer les cieux sans être dévasté. » (p.31) Le réveil est-il mort et renaissance, poursuite du rêve, révélation ? Domine cependant la solitude, et la vision, loin d’apporter confiance et certitude, ne fait que plonger davantage dans la douleur, faisant jouer ombres et lumières dans une dialectique de l’aveuglement et de l’éblouissement également présente dans Fin de l’hiver et de nombreux autres poèmes. Au lieu de la voix divine qui se dérobe et se dissipe, c’est un regard humain qui connaît ici l’aventure de l’effacement dans une consumation plus infernale que paradisiaque, « se propageant dans la fraîcheur des sapins ». Le divin suggéré dans ce passage est donc plutôt terrible qu’animé par la tendresse. C’est alors que la voix poétique commence sa méditation : « Existe-t-il des âmes qui ont autant besoin/ de la présence de la mort que moi, de protection ?/ Il me semble que si je parle assez longtemps/ je répondrai à cette question, je verrai/ tout ce qu’elles voient, une échelle/tendue hors des sapins, tout ce qui/ les incite à échanger leur vie avec d’autres - ».
Mais la connaissance ne sera pas donnée : « Je me suis réveillé ignorant dans une forêt », et c’est alors que s’élèvent les vers cités par Marie Olivier à propos de la voix « si gorgée de chagrin », le poème s’achevant par le constat d’une affliction sans remède : « Je n’avais même pas conscience de la peine que je ressentais/ jusqu’à ce que ce mot vienne et que je sente/ la pluie sourdre de moi. » Dans la solitude encore plus absolue qu’au seuil du poème, l’intensité de l’émotion se retient pourtant : vibrant entre les mots très simples, presque prosaïques, son lyrisme ne cède pas au pathos, mais dit avec sobriété la nudité fondamentale de l’âme. Il en découle un sentiment de très grande beauté, mais aussi d’étonnement radical qui prend la place la plus haute. Comme le poème le laisse d’ailleurs entendre, la voix musicale qui exprimerait pleinement le chagrin n’est de toute façon pas donnée, la voix poétique étant donc, de façon paradoxale, formulation dérivée, ou expression de son absence, ou encore manifestation de silence par et dans les mots. Au lieu d’une voix, c’est une pluie qui sourd du « je » présent absent du poème – comme un retour à l’ordre naturel des existences.
L’ambivalente liaison entre la vie et l’affliction est constante, comme le donne par exemple à lire parmi d’autres, le premier des poèmes appartenant à la catégorie des Matines : « Le soleil brille ; près de la boîte aux lettres, les feuilles/ du bouleau pliées, plissées comme des nageoires/ En-dessous les tiges creuses des jonquilles blanches/ Ailes de glace, Cantatrices ; les feuilles/ sombres de la violette sauvage. Selon Noah,/ les dépressifs détestent le printemps, déséquilibre/ entre les mondes intérieur et extérieur. Je plaide. Différemment – être dépressive certes mais en un sens attachée/ avec passion au tronc vivant, mon corps/ bien enroulé dans le tronc fendu, presque en paix dans la pluie du soir/ presque capable de sentir/ écumer et s’élever la sève : selon Noah,/ c’est une faute typique des dépressifs, s’identifier/ à un arbre alors que les cœurs joyeux/ virevoltent dans le jardin telles les feuilles mortes, images/ d’une partie, pas d’un tout. » (p.27) Le poème commence donc avec délicatesse, comme par des notes précises et sobres, réunissant quelques fragments d’un jour. L’ordinaire apparaît. De lui se donne à lire la stupéfiante beauté de feuilles naissantes, de toute une végétation fragile, et le soleil qui brille près de la boîte aux lettres laisse peut-être présager un message, l’arrivée de quelque signe longtemps attendu. Intervient alors un personnage poétique, de ceux que Marie Olivier nomme dans sa préface des « personae », un certain Noah qui est un des deux seuls personnages nommés avec un nommé John, et fait partie des dédicataires du livre.
La traductrice nous apprend qu’il s’agit respectivement d’un fils et d’un père, ce qui permet de relier le « je » récurrent de nombreux poèmes à une vie familiale, un petit monde humain, sans que rien de nettement autobiographique ne mette en péril l’universalité flottante qui s’exprime ici. Suit un débat de la détestation ou de la passion du printemps, dont nous comprenons aussitôt qu’il est inséparable d’un questionnement métaphysique. Il débouche, une fois encore, sur une oscillation des possibles entre fils et « je » d’une possible mère, comme le laisse supposer l’usage du féminin au huitième vers « être dépressive ». Faut-il préférer l’unité d’une identification, quitte à loger son corps dans un tronc fendu, et donc évidemment matriciel, mais aussi échelle de Jacob – un des poèmes du recueil porte ce titre et arbre de vie ? Ou bien doit-on plutôt choisir l’allégresse éparse des feuilles mortes emportées par le vent, sans qu’un principe les relie à un tout ?
Si la question se pose, qui du fils ou de la supposée mère a raison ? Chacun ne suit-t-il pas une ligne logique propre à son rôle ? En tout cas, l’être humain, qu’il soit femme ou homme, est en éternelle contradiction avec lui-même, égaré sur la ligne de son indécision entre les mondes, comme dans Ciel et terre : « Là où l’un s’arrête, l’autre commence./ Au-dessus, une bande de bleu ; en-dessous,/ une bande de vert et d’or, de vert et de rose profond.// John se tient au bord de l’horizon : il veut/ les deux à la fois, il veut/ tout à la fois. » (p.87) La grande force de Louise Glück est de faire varier les tonalités et les registres, de ne jamais s’enfermer dans une seule dimension et ainsi ne parvient-elle que mieux à ses fins : nous faire vivre à notre tour cette constante hésitation entre des contraires et leur unité. Le sourire vient donc, non pas annuler ou atténuer, mais éclairer d’un contour discret et d’autant plus net, la périlleuse situation des vivants : « Comment puis-je laisser mon mari/ planté là, dans le jardin, à rêver ce genre de chose, son râteau/ victorieusement en main,/ prêt à annoncer cette découverte// alors que le feu du soleil estival/ s’obstine au point mort,/ entièrement contenu par/ les érables en feu/ au bord du jardin. »
C’est de nouveau, sous forme réduite, l’image de la forêt incendiée de Trillium. Cette légère vibration d’absurde difracté par un humour inattendu, se retrouve à plusieurs reprises. Par exemple dans l’un des poèmes appartenant au groupe des « Vêpres » : « Il y eût un jour où je crus en toi : je plantai un figuier./ Ici, dans le Vermont, pays/ sans été. C’était un test : si l’arbre poussait, alors cela voudrait dire que tu existais.// D’après cette logique, tu n’existes pas. Ou alors tu existes/ exclusivement dans les contrées plus chaudes,/ en fervente Sicile, au Mexique ou en Californie,/ où poussent l’inimaginable/ abricot et la pèche fragile. » (p.95) L’arbre de vie ne pousse pas sous toutes les latitudes, loin s’en faut. Dieu est au moins méditerranéen, voire tropical. Ou il n’est pas. Mais cette tentative de tester l’existence de Dieu n’est-elle pas aussi une forme secrètement pathétique de l’appeler à accorder un signe, voire une faute particulièrement grave puisqu’elle prend la forme d’un défi ? La fin du poème en laisse vibrer la suggestion dans ces vers bien plus douloureux que le « je » à l’œuvre n’aurait à l’origine voulu l’avouer : « Et personne d’autre ne prie/ plus intensément que moi, avec autant/ de désir douloureusement réprimé, où ne mérite/ de s’asseoir à ta droite, si tant est qu’elle existe, de se sustenter/ du périssable de la figue immortelle,/ qui ne voyage pas. »
Un autre indice que ce défi est bien aussi supplication suffocante, nous est donné dans un des poèmes de la série des « Matines » : « Tu veux savoir ce que je fais de mon temps ?/ Je marche dans la pelouse devant la maison, je feins/ de désherber. Tu devrais savoir/ que je ne me mets jamais à genoux pour désherber, arracher/ des bottes de trèfles des parterres de fleurs : en fait,/ je cherche courage, une preuve/ que ma vie va changer, mais/ cela prend un temps infini,/ (…) Tu veux voir mes mains ?/ Aussi vides à présent qu’à la première note./ Ou le but était-il de continuer sans un signe ? » (p.73) Le jardinage n’est jamais jeu d’horticulture, passe-temps, passion purement florale. En lui s’engage un autre jardinage, secret, invisible et poétique, celui de la question irrémédiable et sans réponse. Comme si le créateur du jardin avait disparu aussitôt après avoir dessiné son œuvre, l’effaçant avec lui, pour laisser aux seuls faibles humains le soin de tenter sans cesse de créer de nouveaux jardins précaires, voués eux aussi à la destruction - les arbres de ce poème sont en effet atteints d’une maladie dont on ne sait si elle est seulement celle de l’automne qui les dépouille rituellement, selon les lois saisonnières, ou une atteinte beaucoup plus grave, capable de mettre en péril leur vie même.
Reste pourtant une forme d’espoir, aussi ténu soit-il, et c’est lui qui, avec une forme de ferveur inquiète, s’exprime dans Les lys blancs, dernier poème du recueil. Son écriture, tout comme sa traduction de l’anglais, sont admirables. Le lyrisme sait y conserver intacte l’énigme finale, entre vie, mort et renaissance : « Alors qu’un homme et une femme plantent/ un jardin entre eux comme/ un lit d’étoiles, ils sont là : à s’attarder un soir d’été/ et le soir se/ refroidit de leur terreur : tout ça/ pourrait prendre fin, il est capable/ de tout dévaster. Tout, tout/ peut disparaître, à travers l’air embaumé/ les colonnes étroites/ s’élèvent inutiles, et au-delà,/ une mer déchaînée de coquelicots -// Chut mon amour. Peu m’importe/ le nombre d’étés qu’il me faut vivre pour revenir :/ cet été, nous sommes entrés dans l’éternité./ J’ai senti tes deux mains/ m’enterrer pour libérer sa splendeur. » (p.149)
Texte, encres sur papier et photographie de Marc-Henri Arfeux