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Rubato, par Jean-Yves Fick et Bona Mangangu

mercredi 30 décembre 2015, par Sabine Huynh

Rubato est un livre de dialogue entre l’espace des deux voix / gestes du poète Jean-Yves Fick et du peintre Bona Mangangu. Le livre paraîtra aux éditions publie.net en 2016. Merci aux auteurs pour ces extraits en avant-première.

Notice de Jean-Yves Fick :
La suite de quarante-six poèmes intitulée Rubato accompagne une série de vingt peintures de Bona Mangangu, à laquelle elle « dérobe » son titre.
Dimension des œuvres (unique) : 100 x 86 cm
Année de création : 2007, France.
Retouche : 2014, finalisation 2015, Sheffield, England.
Technique mixte : brou de noix, acrylique, huile et encre de Chine.
Support : papier meunier.

un rideau parcouru de voix
peindre – une eau vive chute et danse
parmi la bruyère et la lande
le ciel loin au blanc comme joie

ce n’est pas du jour ni la fin
ni même l’horizon des mers
– la dune intangible et déserte
que le vent érode et emporte

sans forme ni nom – l’aile nue
esquisse une ombre et son estran
elle le devenir qu’ajoure

l’insaisissable chant de vivre
– l’énigme du sable demeure
sans même ce rien qui se rêve.
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la forge des étoiles
vient luire et reformer
– incarné – le brasier
au creux de chaque pas

toute une impermanence
de songe – ces reflets
la source que l’on vient
prier dans l’écoute commune

– sous la nuit le silence
– un vaciller de flammes
brèves – traversées – nues

une lumière rêve
et des mots lui accordent
la terre où nous errons.
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3.

avant même le geste
souverain – ce connaître
la nuit nue absolue
elle l’hospitalière

– la frange du visible
s’avance continue
– on ouvre la demeure
l’obscurité est bleue

tout un monde délié
paraît dans la ténèbre
l’inconnu ou son souffle

au fleuve ce rivage
écrire sur le sable
l’oraison et la vague.
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4.

contre ressac – la roche
surgie de la falaise
d’ici même – le havre
et toute lumière possible

la forme flottée vide
suspendue parmi rien
– rocs rêches de broussailles
– et la fresque des aubes

et toutes les fureurs
– les heures conjurées
au tumulte du flot

rien ne sera sinon
une voix
que renouvelle l’inaudible.

9.

la ligne de chant
et la source nue
seule auprès des pas
– nulle autre musique

que le souffle – rythme
et l’air étincelle
un cristal – le sel
et le pain donnés

on va – qui franchit
l’orée – comme un songe
– accomplit les arbres

cimes de fruits mûrs
– et rien n’en recueille
jamais tout le miel.
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10.

sans que rien ne soit autre
cela bat – la ténèbre
chaque bloc d’abîme
ne sont plus

la main demeure orante
à l’aurore du peindre
l’étrangeté des Nombres
un monde transparent

et la nuit toute – indicible
– une voix claire tremble
où cesse le rivage

sereine est son eau
elle qui puise devenir
à la béance même.
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11.

de passage à jamais
au faîte du bleu comble
la forme des nuages
et peut­être la pluie

étoilée de comètes
– elles qu’on ne saurait
nommer les éphémères
– quel être marche ici

son geste ne se tourne
pas vers qui le regarde
on dirait qu’il s’efface

du monde qu’il rejoint
– l’un de ceux par qui tout
s’anime – l’invisible.
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12.

le cercle de l’aire
avant la moisson
la poussière sèche
d’attendre la pluie

là­bas sont des feux
auprès des falaises
ce sont ceux de pâtres
– nul ne voit jamais

leurs visages ni
leurs mains qui accueillent
puis laissent aux roches

une empreinte rouge
par quoi se désigne
le rêve à rejoindre.

19.

que dire de l’absence
quoi delà la figure
il semble que le songe
cesse où il s’entremêle

au devenir le geste
que retiennent le vide
et ce reflet d’eau vive
comme_un plain chant résonnent

chaque instant le vieux rêve
d’avoir été reverse
l’ajour à son néant

quelques poussières brûlent
mais la lumière brève
porte de l’éternel.
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20.

d’où venue la figure
et déjà elle va
au partage des eaux
ô elle qui acquitte

sur l’estran toute terre
cède la roche d’être
où s’avance encore un
autre feu sans amarre

et le jour ne peut rien
qu’accepter – que ce ce pain
cette eau soient seuls donnés

à la faim à la soif
la parole plus pauvre
simple traverse l’ombre.

(Page élaborée avec la complicité de Sabine Huynh)


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