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Le paysage est sans légende : un livre de James Sacré et Guy Calamusa (Ed. Al Manar - 2012)

samedi 14 décembre 2013, par Roselyne Sibille

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________________A travers ces transparences
________________Le dessin d’un paysage se brouille, autant
________________Que d’autres dans les souvenirs qu’on a,
________________Ou dans les pensées qui viennent
________________A cause que devant nous, le monde.

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________________Une sorte de raccommodage en peinturant.
________________Parfois la ligne la plus fine et finement continuée
________________(On la voit qui file en liseré de montagne
________________Ou sentier dans une pente
________________Puis rien dans le blanc du papier
________________Entre le vivant de quelque village
________________Et des salissures noires).
________________Tout se défait quand même malgré que tenu
________________Dans le format de la page.

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________________Les figures de vivants qu’on peut voir
________________Sont trop dans nos yeux ou parties trop loin ;
________________Quelque chose
________________Comme des cailloux de granit noir dans les environs d’Agloo
____________________ ( tu ramasses)
________________Ou le haut déchiré d’un palmier sans palme
________________(Tu ressens l’à côté de la mort
________________Dans le temps mal nommé).

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________________Parfois les taches de peinture sont plus fortes
________________Et mêlent du bleu à des marron,
________________Du gris se gonfle et disparaît
________________Dans le ciel ou le blanc du papier. La ligne oblique d’un village
________________Se cherche, comme un peu d’écriture
________________Qui ne saura pas dire.

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________________Une grande nuée se donne
________________Comme un allusif fond mouillé qui a
________________Rendu vif un gribouillis de paysage
________________(Ou si ce qu’on a rêvé
________________S’est défait dans le geste de faire ?)
________________On y distingue un petit personnage :
________________Quelques traits d’encre qui sont
________________Gestes d’avoir vécu en ce qui n’est plus là
________________Et solitude d’un graffiti, comme un essai raté
________________D’affirmer de la vie


Guy Calamusa est d’origine sicilienne. Né au Maroc, il est profondément attaché à la Méditerranée, à cette mer carrefour des civilisations. Autodidacte, son travail met en scène un monde en devenir, en gestation où le peintre, d’une toile à l’autre, accomplit un travail de tisserand.
A travers chaque tracé de crayon, de mots, de signes, de points qui se joignent et disjoignent, le peintre semble recoudre le tissu d’un déracinement intérieur. Par ailleurs, des symboles récurrents -oiseaux, échelles, barques- amènent vers un sens plus caché du monde. On y découvre des oiseaux aux regards interrogateurs, souvent figurés au bas du tableau. Ils semblent avoir perdu l’usage de leurs ailes et scrutent d’un air étonné le centre de la toile. Ou encore ces petits dessins, ces lignes griffées, ces points, ces numéros reconstituent peu à peu la carte d’un voyage imaginaire ou d’un paysage empli de broussaille. Parfois, des petites silhouettes noires stylisées tendent vers le ciel leurs bras trop courts et nous observent. Ailleurs, ce sont des signes posés au hasard de la surface de la toile -chiffres, lettres, enchevêtrements de tracés de crayons gras, secs- posent les jalons d’une écriture hiéroglyphique.
A propos de ces signes, dans une lettre adressée au peintre, Jacques Dupin parle d’« aimantation énigmatique » et écrit qu’ils renvoient « à une poésie d’une errance laconique ».
En effet, l’espace dans les tableaux est ouvert, la peinture est « en broussaille » pour reprendre une expression à James Sacré, comme si le souci majeur était ici de souligner l’aspect inachevé du tableau, l’aspect chaotique des couleurs et par là-même du monde.
Un autre aspect de cette ouverture se retrouve dans les rencontres de poètes que le peintre a sollicités -échanges de courriers, de dessins, voyages- et qui ont donné lieu à des petits livres d’art. Plusieurs livres ont vu le jour avec Vénus Khoury-Ghata, James Sacré, Toni Maraini, Jeanne Hyvrard, Jean Gabriel Cosculluela, Sylvie Durbec.

La fiche d’auteur de James Sacré sur Terre à Ciel


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