Cinq artistes proposent leur vision pour un même texte de Vincent Ravalec, autant de livres surprenants aux éditions du Bourdaric.
Peggy Viallat Langlois
Peggy Viallat Langlois
Frédéric Arditi
Frédéric Arditi
Klervi Bourseul
Klervi Bourseul
Raphaëlle Lavaud Bonnard
Raphaëlle Lavaud Bonnard
Nathalie Tacheau
Nathalie Tacheau
Les Insectes
J’ai inventé les formes
J’en ai fait des choses qui marchent
Je leur ai donné la parole
Pour qu’ils se racontent des histoires
Un peu inquiet, le soir dans le noir
Je les ai poussés dans ce monde
Peuplé d’armées étranges, de valets narquois,
D’anges déchus, et de reines folles.
J’ai appris à leurs fils
La beauté des artifices
Le secret des maléfices
Et j’ai scellé leur sort
Du sceau atroce
Des épouvantes
Et de ma mortContrairement à certaines maisons, aux monuments historiques, aux mammifères, à la gente ailée et à l’espèce humaine (nous-les-humains), beaucoup d’insectes ne sont pas l’expression tangible d’êtres issus de notre univers étoilé. Ils sont au contraire le plus souvent la représentation palpable de traces s’étant symétrisées au contact de l’espace que nous connaissons, en provenance de ces autres dimensions, improbables et instables, qui constituent des bords et fragments de ce que l’on appelle communément le Grand Univers.
A ce titre il est recommandé de les nommer et de les étudier avec circonspection.De la même façon que leur évocation littéraire doit faire l’objet d’une attention particulière, assortie de mise en garde, et d’un système de sécurité permettant d’isoler les impacts psychiques provoqués par une représentation trop précise de leur nature profonde, le détail de leur texture, leurs essences, seront représentés avec prudence, sous peine de plonger le lecteur, même aguerri, dans l’effroi et la tourmente.
Sur notre planète les insectes ont été regroupés au sein d’une classe appelée INSECTA, dans le sous-embranchement des hexapodes, lui-même inclus dans l’embranchement des arthropodes faisant partie d’un sous-groupe au nom évocateur, les mandibulates.
Cette précision administrative évacuée, précisons que ni les araignées, ni les scorpions ni même les acariens des poussières, -qui sont peut-être des formes de nous-les-humains primitives- n’en font partie.Les insectes sont nombreux, certains parlent d’un million, d’autres de six millions, ou même de trente millions. Quoi qu’il en soit il est évident que cette frange de ce que nous-les-humains appelons le vivant nous est en grande partie cachée, obéissant à des lois (ou a des non-lois) probablement très loin de ce que nous pouvons imaginer.
Ils sont d’ailleurs, au regard de leur nombre et de leur diversité, peu représentés dans la fiction. A l’exception de certaines Fables, de Maya l’Abeille, de Jiminy Cricket et de quelques autres films mettant en scène mouche ou fourmi, le gros du bataillon, les cohortes infernales sorties des phases aléatoires du néant, sont peu présents dans les supports secrétés par la civilisation pour exprimer son imaginaire.
Certains de leurs représentants occupent cependant une place particulière au panthéon de nos phantasmes. C’est le cas de la Mante Religieuse, redoutable prédateur qui peut aller jusqu’à dévorer son partenaire sitôt le coït accompli. Mais aussi du Papillon, symbole du butinage pacifique, du soleil et de l’été, de la Fourmi, si travailleuse, de la Cigale, éternelle insouciante. Hormis ces faces émergées, le reste de ce monde demeure peu connu et garde ses mystères. Les insectes pensent-ils ? Ressentent-ils ? Ont-il une proprioception ? Une conscience d’eux-mêmes ? Il est difficile de répondre à ces questions, qui ont probablement des réponses diverses selon le genre désigné.
Toujours est-il que dans un avenir peut-être proche, les insectes peuvent se trouver en interaction plus violente encore que par le passé avec la fréquence de conscience au sein de laquelle nous-les-humains évoluons. Si le réchauffement se poursuivait, il est plausible que les larves d’insectes, qui meurent chaque hiver, ne soient plus détruites par le gel et génèrent une prolifération des insectes sans précédent, transformant les terres aujourd’hui salubres en des contrées marécageuses et infestées de fantômes d’êtres avec qui la négociation seraient pour le moins hasardeuses.
Il est nécessaire que nous-les-humains soyons capables de faire face à cette éventualité, sachant que les réponses chimiques ne peuvent avoir qu’un temps, d’une part car la pollution engendrée par de tels recours conduit à la détérioration de la terre, mais également car les insectes peuvent exsuder des anticorps rendant les produits inefficaces.
Il convient donc de se préparer par le biais de la magie à de subtiles modifications de notre être.Les facultés de symbiose, le renforcement des champs magnétiques de protection, les défenses génétiquement acquises, les basculements psychiques permettant de supporter le froid mental qu’émettent certaines créatures, tout cela doit s’organiser autour du socle commun de nous-les-humains, structurant ainsi des panoplies d’invincibilité, les forgeant dans les miroirs astraux, et annihilant ainsi préventivement les reflets de malheur qu’une confrontation avec les insectes provoquent inéluctablement.
De plus la mémorisation des molécules chimiquement élaborées par la civilisation que nous-les-humains avons édifiée permettra d’agir de façon dissuasive en cas de combats.
Toutefois cette alternative ne doit être envisagée qu’en dernier recours, les solutions privilégiant une dynamique équilibrée devant être la règle.L’ouverture de possibles vers des futurs plus en phase avec ce que nous imaginons de l’harmonie se doit donc d’être imaginée, et pour cela, trait d’union évident avec les insectes, les Fleurs sont nos alliées naturelles. En effet, la pollinisation, les échanges amoureux, une partie de la transmission artistique, se font grâce aux ballets incessants des insectes attirés par le nectar des fleurs, qui elles-mêmes rivalisent d’audace et de complexité afin de séduire le maximum de pollinisateurs.
Il n’est ainsi pas impossible que, les Fleurs, où un état hybride entre, par exemple, les Fleurs et la vibration des ailes d’insectes, les Fleurs et le souffle de l’air quand il s’humidifie de la cyprine naturelle de la terre, soient un devenir attrayant et viable pour certains de nous-les-humains.
Ainsi une part de notre espèce accèdera-t-elle finalement à ce que les hippies appelaient de leurs vœux, un Flower Power magistral, une vibration érotisée qui structurera, sans heurt ni guerre, le champ de la Conscience, dans un écosystème rempli de lumière, de couleur et d’amour.
Après tout, pourquoi pas ?
Pour découvrir mieux les éditions du Bourdaric, un entretien avec Renaud Vincent, éditeur et galeriste :http://www.terreaciel.net/ecrire/?e...
(Page établie grâce à la complicité de Roselyne Sibille)